Testament de musique de chambre, les Suites pour viole de François Couperin constituent un sommet du répertoire dédié à l’instrument. Naviguant entre l’univers classique de la suite de danses et celui des pièces de « caractère » celles-ci usent d’affects et de contrastes qui n’est pas sans évoquer le monde de l’opéra et du ballet ; la réunion des « goûts » chers à François Couperin lui permettant d’opérer une synthèse magistrale, poétique et virtuose entre les styles français et italien. A cette langue résolument personnelle, Claire Gautrot et Marouan Mankar-Bennis choisissent en contrepoint d’y associer le 3ème Concert Royal que Couperin écrivit une quinzaine d’années plus tôt pour les concerts privés du « feu-Roy » Louis XIV. D’un ton à la fois plus contenu et digne, ces pages, obéissant à l’art de la conversation, font dialoguer les deux instruments, tour à tour solistes et accompagnants, tout en faisant se succéder dans un juste équilibre, grandeur aristocratique et évocations naïves et pastorales. Une sérénité qui, en comparaison à l’éloquence passionnée des Pièces pour Viole, se teinte, sous les doigts des interprètes, d’une indicible mélancolie.